Après avoir parlé du début de l’histoire du cuir, il est temps de parler de la ville de Grauhlet et comment celle-ci a été amené petit à petit à devenir la capitale de cette matière si spéciale.
Graulhet va entrer dans la légende du cuir à son tour !
Comme à Troyes, Dijon, Amiens ou Limoux … Graulhet se spécialise et tanne le cuir elle aussi. La ville est connue de très loin car rapidement elle maîtrise les trois facteurs indispensables au tannage : l’élevage, l’eau et la forêt.
Elle a un SECRET, un tanin spécial la Rusque de Garric ou tannage à la garouille (écorce de chêne) qui faisait des merveilles associé au ph presque neutre de l’eau du Dadou.
On ne saurait jamais assez insister sur l’importance des forêts de chênes de Graulhet qui servaient de bois d’œuvre pour les maisons médiévales à pans de bois et dont l’écorce des racines broyée donnait un tannage fort recherché.
C’était un tannage rapide pour les cuirs de bovins, qui, ailleurs, nécessitait 18 mois alors qu’à Graulhet il suffisait de 2 mois ! La couleur du cuir était d’un gris verdâtre, son prix abordable et sa solidité était inégalée en France.
Les « grolliers » cordonniers se multiplièrent et, très rapidement, leurs « croquenots » furent recherchés en raison de leur solidité. Un bûcheron faisait 4 ans de ses souliers de garouille, avec un simple entretien à l’huile de pied de bœuf.
C’est ainsi que, sous Henry IV, le marteau figura sur le blason de la ville. En héraldique le marteau représente l’objet qui sert à rompre et arracher les cottes de maille, ce qui indique que Graulhet était une place forte particulièrement bien défendue. Il représente aussi, dans l’imaginaire populaire, le marteau de cordonnier symbolisant le travail local du cuir.
C’est à cette époque que se situe un évènement très particulier à Graulhet : les lépreux de la maladrerie de l’Hôtel-Dieu de Toulouse s’en échappaient pour venir à Graulhet, au péril de leur vie, demander du travail sans autre rémunération que la permission de tremper leurs plaies dans le bain des peaux tannées au jus de garouille. En effet la garouille ayant une possibilité de pénétration des dermes bien supérieure aux autres tanins, associée au collagène des peaux, avait un effet cicatrisant. On ne constata aucune contagion. On dit même que certains guérirent, et que nombre d’entre eux restèrent à Graulhet.
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Jean Louis Julié
Natif de Graulhet, issu d'une famille de mécaniciens, spécialistes des machines du travail du cuir, j'ai commencé ma carrière professionnelle très tôt à 17 ans. D’abord à Graulhet puis rapidement en région Lyonnaise. Chez le leader mondial de construction de machines de tannerie. Très vite, au service export me voilà parti à sillonner le monde (début des années 70), à la rencontre de cultures et de traditions de notre fabuleux métier. Puis j'ai évolué en apprenant sur le tas comme beaucoup avec en parallèle une formation continue (CNAM). Je suis très impliqué dans le monde du cuir à Graulhet, et suis actuellement Secrétaire Général du "syndicat des patrons mégissiers de Graulhet". Je continue apprendre tous les jours à l'heure ou d'autres ont choisi une retraite bien méritée. Mon travail c'est ma passion! (avec la cuisine...).